Avec l’été, la chaleur, les concours de bières, on pensait que nos amis vampires iraient cuver leur hémoglobine à l’ombre, voire hiberner jusqu’à l’hiver prochain. Mais non… Dix-huit mois après la sortie au cinéma de Facination, premier volet de la saga de Stephenie Meyer, les fans sont toujours aussi mordus de Pattinson et son air de gendre idéal.

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Il faut dire que les producteurs de Twilight maîtrisent l’art d’attiser le désir des néo-vampirophiles : à la fin d Hésitation , le troisième chapitre (en film) sorti le 7 juillet, Bella n’a toujours pas tranché entre Jules (le loup-garou) et Jim (le vampire), et Edward joue encore à la vierge effarouchée quand sa chérie s’avise de l’embrasser avec la langue. Et on sait déjà que le quatrième et dernier tome va être adapté en deux films, histoire de vendre deux fois plus de Cornettos à l’entracte.

Les pensées d’un vampire féminin

Cynisme mis à part, force est de reconnaître que Stephenie Meyer mène étonnamment bien sa barque, comme si sa vampirisation des ventes suivait une voie toute tracée. Ainsi, pour les plus affamés qui auraient déjà englouti Révélation, Meyer a concocté pour l’été une fiction dérivée de Twilight : L’Appel du sang, ou le destin d’une vampirette de 15 ans, Bree, qu’on entraperçoit dans le troisième tome, avant qu’elle soit anéantie par Jane, chef des puissants Volturi.

Le fait, d’ailleurs, que le plus haut gradé de la confrérie des vampires soit une ado de 16 ans qui en fait 8, n’est pas un hasard, tout comme le choix de mettre une vampirette, et non son homologue masculin, au centre de L’Appel du sang. Si ce sous-produit de la saga mère s’avère plus ou moins une arnaque (l’élaboration d’une armée de jeunes vampires débiles censés anéantir les Cullen), Meyer fait sauter un nouveau tabou de la “bit lit” : elle énonce les pensées, à la première personne, d’un vampire féminin. A savoir : sa soif de sang (de sexe), sa malédiction (sa puissance)…

Vampirettes, "ni putes ni soumises"

En faisant un petit tour d’horizon de la saga, on réalise que les postes du pouvoir sont trustés par des femmes : le commandement des Volturi par l’impitoyable Dakota Fanning, l’armée des “nouveaux-nés” par la rousse et vindicative Victoria, qui embobine le premier quidam venu afin de venger son ex. Côté clan Cullen, seule la demi-soeur d’Edward détient le pouvoir suprême de voir l’avenir, tandis que Bella, sous ses airs de petit renard sucré, n’en est pas moins la cause de combats interethniques entre loups-garous, méchants et gentils vampires.

Meyer a vidé la “bit lit” de ses vampirettes immémoriales (celles qui violent quasiment Keanu Reeves dans Dracula), comme de ses vierges transies (Mina/Winona Rider dans le même film) et belliqueuses (Buffy). “Ni putes, ni soumises”, voilà ce qu’elle semble nous glisser entre les lignes.

A la fin de Twilight 3, dans un champ de pâquerettes, Edward tente une dernière fois de dissuader Bella de l’épouser. Ne serait-elle pas aveuglée par son amour pour lui ? Ne regrettera-t-elle pas d’être changée en vampire ? Bella le mouche par une formidable déconstruction amoureuse deleuzienne : ce n’est pas seulement toi que j’aime, mais aussi d’où tu viens, ton “territoire”. La révolution des vampirettes est en marche. Et la saga de Meyer au top des ventes pour encore un moment.

L’Appel du sang de Stephenie Meyer (Hachette), 210 pages, 13,90 euros